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Rencontre avec Michel Chandeigne, expert de Magellan

1520 : découverte du détroit de Magellan

Michel Chandeigne est spécialiste des voyages maritimes et éditeur. Sous le nom de Xavier de Castro, il a réalisé une dizaine d’ouvrages dont un monumental Voyage de Magellan 1519-1522 qui rassemble et confronte pour la première fois tous les témoignages directs sur l’expédition et fait aujourd’hui référence dans le monde. Conversation avec ce passionné de l’histoire des grandes découvertes.

Michel Chandeigne accompagne notre voyage événement à l’occasion des 500 ans de la découverte du détroit de Magellan. Il brise nombre d’idées reçues et vous conte la folle odyssée du célèbre navigateur dans un salon du navire...

Vous êtes reconnu comme l’un des spécialistes majeurs de Magellan. Pourquoi cette passion pour le navigateur portugais ?
Michel Chandeigne : Au départ, j’avais voulu réunir et confronter dans notre collection « Magellane », dédiée aux grands voyages maritimes, tous les témoignages des marins embarqués, outre celui de Pigafetta, le plus célèbre. À ma très grande surprise, je me suis vite aperçu qu’un tel travail n’avait jamais été fait en aucune langue, et que – de plus – toute la bibliographie que je lisais sur le sujet fourmillait d’erreurs récurrentes et de contradictions ! J’ai donc réuni une petite équipe pour publier en 2007 une monumentale édition réunissant 26 récits, lettres et documents, rectifiant de nombreuses erreurs et apportant de nouveaux éléments inédits. Avec notamment un index de tous les marins embarqués (exactement 242), qui compilaient de nombreuses données éparses et a permis, entre autres, de déterminer qu’il y eut en fait – à rebours des idées reçues – 91 survivants, desquels 35 firent le tour du monde (dont un Français). Sur un sujet aussi célèbre, ce travail d’édition a donc été particulièrement exaltant et le demeure.

Pourquoi le nom de Magellan reste-t-il gravé dans l’imaginaire collectif ?
M. C. : Avec Colomb, Magellan est le plus célèbre des navigateurs car son voyage a abouti au premier tour du monde, le plus mythique des voyages dans notre imaginaire, et celui-ci fut une extraordinaire aventure humaine, magnifiquement décrite par le très beau récit de l’Italien Antonio Pigafetta, l’un des survivants. La brève biographie de Stefan Zweig (1938), souvent erronée mais fort bien écrite et partout traduite, joua et continue encore de jouer un rôle majeur de divulgation auprès du grand public.

Magellan avait-il pour ambition secrète d’effectuer le premier tour du monde ?
M. C. : Non, le projet de Magellan n’était en aucun cas de faire le tour du monde. Son but était d’atteindre les Moluques, les « îles aux Girofles » par l’ouest et il avait reçu l’ordre du roi de revenir expressément par la même voie, pour demeurer dans la demi-sphère dévolue aux Espagnols depuis le Traité de Tordesillas (1494) et ne pas pénétrer dans le domaine portugais. Le tour du monde, finalement réalisé par le Basque Juan Sebastián Elcano, capitaine de l’un des deux navires parvenus aux Moluques, la Victoria, a été complètement imprévu.

Reste-t-il encore des zones d’ombres sur le fameux voyage (1519-1522) ?
M. C. : Il reste quelques zones d’ombres, heureusement, sur ce voyage, que notre ouvrage a essayé d’éclaircir autant qu’il était possible. La mort de Magellan et le massacre des officiers qui s’ensuivit demeurent environnés de nombreuses questions, suscitant plusieurs hypothèses que le livre étayent et exposent. En revanche, nous avons pu expliquer la faible mortalité durant la traversée du Pacifique (9 décès parmi 166 hommes), qui est la conséquence presque directe de la désertion d’un des navires dans le détroit. Je n’en dis pas plus.

Qu’a provoqué la découverte du fameux passage vers le Pacifique que l’on nomme détroit de Magellan ?
M. C. : On peut dire que la découverte du « détroit de Magellan » n’a pas eu de conséquences directes, si ce n’est une évolution notable de la cartographie. Cette inutilité rend cette expédition encore plus belle en quelque sorte. En effet, le fameux passage, si difficilement trouvé mais trop lointain, fut vite abandonné, et une tentative de colonisation du détroit échoua dramatiquement. De l’autre côté du Pacifique, les Portugais conservèrent les Moluques durant un siècle. Ce n’est qu’après 1565, quand les Espagnols comprirent comment retraverser le Pacifique d’ouest en est, qu’ils purent coloniser les Philippines, au nom de la première découverte par Magellan, et retirer de ce voyage, enfin, un profit financier et géopolitique. Mais les vaisseaux démarraient alors de la côte occidentale du Mexique et la route du détroit ne fut plus guère empruntée.

1520-2020, dans le sillage de Magellan

Les Maisons du Voyage ont conçu un voyage spécial pour célébrer le 500e anniversaire de la découverte du détroit de Magellan et rendre hommage à ce personnage hors du commun. De l’Atlantique au Pacifique, des sites mythiques rythment cette passionnante traversée : Ushuaia, détroit de Magellan, Cap Horn, glaciers du Lago Argentino et pics de granite des Torres del Paine. Départ le 15 novembre 2020.

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